Désormais, notre vie est évaluée en permanence, la quantified self déborde et autorise la notation de tout ce qui nous entoure. Mais concernant les restaurants et autres fournisseurs de plats et de nourriture, le principe de l’évaluation est-il vraiment juste ? Ou quand une seule mauvaise soirée peut pourrir une vie entière.
Le quantified self, c’est quoi ?
Il est un fait que notre société évalue aujourd’hui tout ce qui passe à portée raisonnable de son smartphone. Entre la dégustation et le nombre d’étoiles, quelques minutes à peine suffisent. Les pros du marketing appellent ça un feedback ou plutôt le règne de l’expérience utilisateur. On goûte, on s’en sert, on essaye, on fait… Et puis on note, on juge, on s’essaie même parfois à la critique complète, voire à l’analyse. En considérant bien entendu que notre avis en toujours un autre. Certains y trouvent un malin plaisir à descendre tut ce qu’ils peuvent, d’autres y placent une forme de conscience citoyenne quand d’autres encore s’en servent en déversoir aux émotions instantanées. Ah ! La joie des réseaux dits sociaux.
Le quantified self, c’est une mesure de soi. C’est aussi un mouvement plus vaste (très vaste !) regroupant les méthodes, les outils et les principes qui permettent à chacun de mesure, d’analyser et de partager ses données personnelles. Il s’agit d’une étude quantitative de soi, c’est-à-dire une transformation de son être en données chiffrées. Et ses principaux outils sont les objets connectés, les applis, les smartphones… Tout ce qui nous permet donc d’évaluer. Parce qu’évaluer l’autre, en somme, ça revient à s’évaluer soi-même par rapport à l’autre. Avant l’avènement des ‘nouvelles technologies’, ces appréciations restaient discrètes ou l’apanage de groupes réduits. Aujourd’hui, nous donnons notre avis sur tout, à toute la planète à chaque fois que nous nous exprimons sur un réseau… C’est qu’il faut exister dans ce monde numérique mondialisé. Il faut y trouver sa place. Se positionner…
Les dangers de l’évaluation permanente
Les sociologues et psychanalystes seraient sans doute les plus avisés pour répondre clairement à cette question. Toutefois, on peut déjà identifier trois grands dangers à cette société de l’évaluation ;
- La vie par procuration, ou la vision du monde effectuée en trop grande partie par l’unique prisme de l’évaluation (toujours par rapport à si, ses goûts, ses envies, son humeur…) ;
- La focalisation sur soi et rien d’autre. Aucun autre centre d’intérêt ne peut venir perturber ce quantified self à moins qu’il ne serve justement à une meilleure évaluation de soi ;
- Les dommages collatéraux. Dans un monde en compétition permanente, l’évaluation faite pour soulager sa colère ou pour se situer au-dessus de la prestation qu’on vient de vivre peut créer des conséquences imprévues.
De toutes petites erreurs qui peuvent coûter cher
Imaginons un restaurant un soir d’été au bord de la mer. En pleine saison, l’établissement est bondé. Le service est forcément plus lent qu’à l’accoutumée. Le personnel travaille à flux tendu. Il suffirait d’un petit détail, d’un rien, pour que la soirée vire au cauchemar en cuisine. Et le petit rien survient. Rien de bien méchant. Mais suffisamment pour désorganiser la mécanique déjà éprouvée. Les délais d’attente s’allongent, la clientèle grogne. La soirée sera longue pour l’équipe. Ce n’est jamais agréable. Pas plus pour le personnel que pour les clients d’ailleurs, mais malheureusement, ça peut arriver. Comme un raté, une erreur, un manquement léger peut nous arriver à tous dans nos professions respectives. Seulement voilà, quand notre erreur reste discrète, celle du restaurateur prend des proportions énormes. Les clients du soir évaluent et influencent les éventuels clients des soirées suivantes. Dans notre mouvement d’auto-mesure, nous avons délivré un message négatif. Non pas qu’il ne soit justifié le jour J, mais son caractère définitif le rend… Définitif. Une erreur, un soir, reste inscrite des années et peuvent avoir parfois de lourdes conséquences.
Alors l’évaluation immédiate, bonne ou mauvaise chose ?