L’histoire d’un plat : La Bouillabaisse

Existe-t-il plat plus mythique en France que la bouillabaisse ? Sans doute que l’image Marseillaise, indissociable du plat, fait beaucoup pour la notoriété de ce ragoût de poissons, véritable plat de pauvres. Ou plutôt, comme l’on dirait aujourd’hui dans la politiquement correct, plat populaire. Car oui, la très grande majorité des plats qui font la richesse du patrimoine culinaire français sont bien des plats populaires, capables de nourrir une famille entière pour deux sous. C’est la récupération de ces plats par la bourgeoisie qui en a fait ensuite les mythes qu’ils sont devenus. Et la fameuse Bouillabaisse n’échappe pas à la règle.

Un ragoût de poisson déjà connu en 600 avant J.C.

Dans le principe, la bouillabaisse est un ragoût de poissons invendus et de restes de la pêche, voire de godaille. Le poisson est frais du jour et frémit dans l’eau de mer ce pendant que les marins remaillent leurs filets. Dans l’absolu, tous les peuples du pourtour méditerranéen disposent donc de leur propre ragoût de poisson. Et ce, depuis des centaines d’années. La bouillabaisse, elle, semble provenir de traditions grecques antiques. Le Kakavia cher aux grecs a fait le voyage depuis la terre natale jusqu’au port de Massalia, fondé en 600 avant J.C. Depuis, la recette s’est ancrée dans le terroir Marseillais et est devenue un plat populaire connu jusqu’à l’autre bout du monde (sans exagération aucune, promis !)

Son nom, elle le doit à sa cuisson. Frédéric Mistral, le bien nommé en terre phocéennes, en a définit son étymologie possible : « boui abaisso », signifiant, en langue provençale : « quand ça boue, tu baisses ». Le but étant justement d’obtenir une cuisson rapide des poissons sans jamais les ‘casser’ et dans une eau qui frémit, l’explication de M. Mistral est à ce jour, et de loin, la plus convaincante. Notez que pour une fois, le nom du plat ne se réfère pas à ses inventeurs, ni aux produits dont il est composé, mais bien à son mode de cuisson.

Les règles pour une vraie bouillabaisse

Dans la tradition, les pêcheurs qui œuvraient entre Marseille et Toulon faisaient chauffer un chaudron d’eau de mer sur la plage pendant qu’ils reprisaient leurs filets de pêche. Les restes et les poissons invendus cuisaient dans cette eau. Puis, le bouillon était versé sur des croûtons de pain frottés à l’ail. Pour accompagner les poissons, mangés à part et toujours entiers, on fabriquait une mayonnaise, elle aussi à l’ail, et au safran ; la fameuse rouille.

Au cours du 18ème siècle, deux restaurateurs Marseillais créent leur restaurant à Paris et importent la recette. C’est à partir de ce moment que naît la notoriété de la bouillabaisse au-delà des frontières provençales. L’eau de mer étant plutôt rare à Paris, on la remplace par un fumet de poissons de roche.

Pour préparer une bonne bouillabaisse, il est préférable de compter plusieurs convives. En effet, on dénombre environ 40 poissons (tous méditerranéens !) capables de composer la fameuse recette, avec au moins 4 des poissons suivants : rascasse, rascasse blanche, galinette (rouget grondin), araignée (vive), congre, saint-pierre, baudroie (lotte) ou scorpène. Autre règle d’or à respecter : La bouillabaisse ne contient pas de langouste ! Pas plus que de moules ou de crevettes !